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Rapport 2018 de l’Observatoire de déontologie de l’information (ODI)

Selon les résultats du sondage rendu public le 15 mars 2018 aux Assises internationales du journalisme à Tours, « 92% des Français considèrent que le journalisme est un métier utile. Les attentes prioritaires des Français vis-à-vis des journalistes sont précises : qu’ils vérifient les informations fausses et les rumeurs (61%), qu’ils apportent des informations pratiques, utiles au quotidien (49%) et qu’ils révèlent des faits ou des pratiques illégales ou choquantes (48 %) »2. Les médias et les journalistes en seront confortés. Mais ces attentes des Français les placent devant une responsabilité accrue en termes de décryptage et d’investigation.
Liberté indispensable, responsabilité nécessaire, sont les fondements de l’information dans une société démocratique. On pourrait y ajouter la fiabilité, la transparence, la traçabilité, mais l’Observatoire de la déontologie de l’information (ODI) a choisi d’insister sur ce qui justifie le rôle social des journalistes et des médias d’information dans la société contemporaine...

Pour une information libre et responsable

Liberté indispensable, responsabilité nécessaire

Fondé en septembre 2012, l’ODI publie son cinquième rapport annuel, portant sur l’année 20171.(1) En cinq ans, l’ODI s’est étoffé. Ses membres sont plus nombreux et plus représentatifs du panorama de l’information. Cependant, l’action de l’ODI est parfois mal comprise, parce qu’elle est entravée par les préventions et les préjugés : nombre d’acteurs professionnels confondent encore, d’une part la ligne éditoriale et les choix éditoriaux, qui doivent rester toujours libres, et d’autre part les pratiques professionnelles appuyées sur la déontologie, qui doivent obéir à certaines règles ; nombre d’acteurs professionnels brandissent encore la menace liberticide d’un « tribunal des médias » ou d’un « ordre des journalistes », alors que l’ODI s’en démarque avec force depuis sa création.

Les « fake news »

Phénomène ancien qui a pris récemment une ampleur inédite, les « fake news » constituent un défi pour les médias et les journalistes. Comment faire entendre une voix « autorisée » dans le brouhaha informationnel généralisé ? Bien évidemment en cultivant les usages professionnels et la déontologie : la vérification, le croisement des sources, la contextualisation, la confrontation des points de vue, le respect de la vie privée et de la dignité des personnes, l’indépendance d’esprit, etc. sont les clefs d’une information plus sûre et plus fiable. On voit mal ce qu’un texte anti « fake news » pourrait ajouter sans donner au juge, voire à des sociétés privées, la mission de séparer en urgence le bon grain journalistique de l’ivraie manipulatrice. D’autant, et notre rapport le souligne, que se développent des démarches et des outils visant à contrecarrer la désinformation de plus en plus massive sur les réseaux sociaux et le web.

La rigueur malmenée

L’exactitude et la véracité des informations sont la première exigence du public. Le zéro défaut n’existe pas plus dans l’information que dans d’autres activités humaines. Les erreurs sur les faits, les imprécisions, les fautes dans le travail de vérification sont inévitables. Mais on observe un relâchement de la rigueur sous l’influence de débats publics virulents et très polarisés, et de la place croissante des fausses informations dans ce que le public reçoit via les réseaux sociaux.
La confusion entre les faits et les opinions est fréquente, tandis que (presque) toutes les opinions sont placées sur le même plan. A cela s’ajoute la confusion également fréquente entre animateur, chroniqueur invité et journaliste. Dans ce magma informel, le public éprouve des difficultés croissantes à se repérer. C’est aussi lié à des phénomènes comme la course de vitesse entre médias et réseaux sociaux, la confusion entre information et divertissement, le glissement vers le commentaire dans des titres, des questions posées, des lancements ou chapeaux, la présentation de chiffres, la non séparation des faits du commentaire. Ce relâchement de la rigueur contribue à nourrir l’accusation de parti pris systématique, de mensonges, de manipulation portée contre les médias. Car ce que le public pardonne de moins en moins, c’est une ligne éditoriale masquée, qui sous couvert d’une affirmation apparemment libre de certaines valeurs, agit pour ou à la remorque d’une obédience, d’une chapelle, d’un parti ou d’un homme.

Un écosystème en recomposition

Comme les années précédentes, l’ODI observe de nombreuses tentatives d’influer sur les contenus. C’est le fait d’annonceurs, via des techniques de publi-reportages ou des partenariats peu rigoureux, ce sont des interventions d’actionnaires dans les choix éditoriaux des rédactions. Mais surtout, cette période a été émaillée d’incidents entre hommes politiques et journalistes, les premiers cherchant de plus en plus à se passer des seconds pour diffuser leurs messages formatés à leur seule convenance, ou se livrant à un média bashing pour se dégager d’informations les mettant en cause ou ne leur convenant pas, au risque d’affaiblir la démocratie dont la liberté d’informer et d’être informé est un des piliers. Le plus préoccupant est sans doute que ces tendances se soient prolongées une fois la fièvre des scrutins retombée.
Quand la course à l’audience conduit à des dérapages
La dénonciation du harcèlement sexuel, sur les réseaux sociaux puis dans des enquêtes menées par des médias fait partie des faits marquants de l’année 2017. Il est important que les journalistes respectent la parole des victimes et s’appuient sur des éléments d’enquête reposant sur des faits, que les deux parties puissent exprimer leur point de vue, afin de respecter la présomption d’innocence, et que l’article ou l’émission n’incrimine pas à charge. Dans le même registre, la stigmatisation et les stéréotypes demeurent trop fréquents et doivent faire l’objet d’un travail des rédactions sur leurs pratiques.

Lutter contre les manipulations de l’information

Observateur des pratiques déontologiques, l’ODI souligne évidement ce qui pose problème, mais ne conclut pas que tout va mal. Tous les jours, les médias et leurs journalistes, en local comme au national, permettent à des millions de citoyens de s’informer en menant un travail rigoureux. Mais ces citoyens sont démunis lorsque la déontologie de l’information leur paraît bafouée. C’est pourquoi l’ODI appelle à une réflexion collective pouvant déboucher sur la création d’un Conseil de déontologie journalistique indépendant que le public pourrait saisir en cas de manquements à la déontologie. Ce conseil de déontologie aurait avant tout un rôle pédagogique. Il serait composé à la fois de journalistes, des entreprises d’information et de représentants du public. Cette instance tripartite ne serait pas un tribunal. Elle n’aurait pas pour mission de sanctionner. Mais de réguler une profession qui a besoin d’être indépendante des pouvoirs politiques et judiciaires pour préserver le bon fonctionnement de la démocratie.

(1) 1 Les précédents rapports sont disponibles sur le site de l’ODI : http://www.odi.media/les-rapports-de-l-odi/

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(poids : 1188076 - Format : PDF)

Mise en ligne le 22 mars 2018
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