Lorsqu’il aborde le multimédia, que peut nous proposer un chanteur célèbre que tous les enfants connaissent et dont le succès ne se dément pas jusque dans les classes des écoles maternelles ? Des chansons bien sûr ! Et des jeux sur les sons et la musique. Mais est-ce que cela suffit pour faire un cédérom complet ? Bien évidemment, cela risque d’être un peu trop restreint. C’est du moins ce qu’ont du penser les éditeurs de ces Récrés d’Henri Dès, puisqu’un certain nombre d’activités proposées dans le programme n’ont pas de rapport avec la musique ou les chansons. Cela nous vaut un mélange d’activités banales et plus originales, ces dernières n’appartenant pas forcement au domaine de prédilection de notre chanteur-présentateur.
La musique reste quand même au premier plan. Dès le générique et dans les principales animations qui agrément l’écran d’accueil. Cliquer sur le poste de radio permet ainsi d’écouter un court extrait musical. Le karaoké n’est pas non plus des plus original. On l’a vu dans d’autres programmes, puisque la formation de l’oreille des petits est un objectif que le multimédia peut facilement prendre à son compte. Les deux ateliers spécifiquement musicaux sont plus exigeants. Dans le Chef d’Orchestre on peut réaliser de véritables mixages en ajoutant ou enlevant à volonté tel ou tel instrument ou groupe d’instruments. La partie jeu propose alors de reconnaître les instruments présents dans un morceau et ce n’est pas toujours si évident que cela pourrait en avoir l’air. Le deuxième atelier propose un travail d’identification des instruments de musique, à partir de leur nom et bien sûr en les écoutant et en les identifiant. Tout cela est sérieux et réalisé avec beaucoup de précision. Mais on pouvait attendre un peu plus d’originalité puisque, encore une fois, ce genre de manipulations peuvent très bien se retrouver dans des programmes d’éveil destinés aux enfants de moins de six ans et dans lesquels le monde sonore ne peut pas être négligé.
Les activités non directement musicales sont ordonnées autour du thème choisi pour chaque titre de la collection (autres titres : Autour du monde, Les animaux de la savane). Dans Sorcières et Fantômes on aura affaire à un environnement jouant sur le fantastique mais en restant toujours très « soft ». Les sorcières et fantômes en question n’ont rien d’effrayants et les enfants qui utiliseront ce programme ne risquent pas de faire des cauchemars la nuit, même les plus petits. Ce qui est proposé ne risque pas non plus de dépayser ceux qui ont déjà eu l’occasion d’utiliser un programme d’activités multimédia. Ils pourront certes retrouver avec un certain plaisir des jeux connus comme un memory (dans lequel le niveau de plus grande difficulté fait intervenir la mémorisation de courts extraits musicaux), un jeu de cube pour reconstituer une image donnée comme modèle, un parcours pour atteindre une cible. Ils pourront chercher l’intrus parmi une série d’images ou identifier un personnage à partir d’indices successifs concernant ses vêtements ou ses caractéristiques physiques. A chaque fois plusieurs niveaux de difficultés sont proposés dont on peut souligner la pertinence. Par exemple, dans le jeu d’identification cité, les indices énoncés verbalement sont visualisés sous forme d’images dans le niveau le plus facile, ce qui disparaîtra dans le niveau le plus difficile. Bref les activités véritablement innovantes sont rares. Signalons quand même une très bonne idée dans le jeu intitulé « la grille ». Il s’agit d’identifier l’emplacement d’une clé dans un quadrillage. A chaque clic, la distance à la cible est indiquée, mais sans préciser la direction. L’enfant est donc obligé de faire des hypothèses successives et de synthétiser les informations obtenues pour espérer réussir autrement que par un coup de pouce du hasard. Le programme mesure le temps mis pour découvrir la bonne case, mais s’il est important de montrer à l’enfant qu’il est important de réfléchir à toutes les données du problème, le nombre de clics effectués serait un bien meilleur critère de pertinence. Il est vrai que même dans les grilles les plus complexes (au niveau de difficulté le plus grand), le nombre de coup minimal sans recourir à la chance est de quatre, ce qui laisse peu de marge pour progresser dans le meilleur score. Mais l’important est ici étranger à toute dimension de compétition, puisqu’il s’agit de construire une stratégie efficace, ce qui implique de comprendre parfaitement tous les éléments constitutifs de la situation globale.
Dans cette activité comme dans toutes les autres, l’enfant n’a la main qu’après avoir suivi une explication de la tâche à réaliser qui constitue une démonstration précise de la procédure à suivre. Lorsqu’il s’agit de type d’activités courantes, comme le memory, cela n’est pas toujours vraiment utile. Surtout lorsque l’on change de niveau de difficulté. Il est vrai que cette présence obligatoire de la démonstration préalable peut être supprimée dans les préférences, ce que les parents ne devraient pas hésiter à faire sans trop attendre, à partir du moment où l’enfant aura pris en main les éléments principaux de l’interface.
Avec de tels programmes, Henri Dès a tout pour réussir dans le multimédia ludo-éducatif. Les enfants y trouveront suffisamment de choses connues pour ne pas être dépaysés. Ce qui d’ailleurs n’enlève rien au sérieux de l’entreprise. D’autant plus que certaines des activités proposées ne manquent pas d’originalité, même si on peut regretter qu’elles ne soient pas plus nombreuses. Et puis on retrouvera avec plaisir ses chansons.
Jean Pierre Carrier