Regard critique sur des contenus plurimédias >> Cédéroms

1+1, une histoire naturelle du sexe
Jean Pierre Carrier

Hyptique - INA (DVD)

Ce DVD est un produit d’un type nouveau, qualifié d’hybride, dans la mesure où il est pour une face, un DVD-Vidéo, consultable donc grâce à un lecteur de salon relié au téléviseur et, pour l’autre face, un DVD-Rom, le grand frère du cédérom bien connu maintenant de tout utilisateur d’ordinateur, mais avec une capacité de stockage d’informations considérablement plus importante (ici elle est de 2 GO). Cette évolution technique ouvre des possibilités longtemps attendues dans le domaine de l’image animée, cinéma, télévision et vidéo, que les limites en mémoire des supports existants jusqu’alors repoussaient toujours à un avenir prochain dont les plus impatients s’inquiétaient de ne pas voir le jour immédiatement.
Support nouveau donc, mais encore peu répandu, dans la mesure essentiellement où sa consultation demande une machine puissante, donc récente, possédant outre un lecteur de DVD, un mémoire vive de 128 Mo et un processeur de type Pentium tournant à plus de 400 Mhz. Toutes les collectivités publiques, écoles et centre de loisirs en tête, sont loin d’être toutes équipées de la sorte.
Mais qu’apporte véritablement cette évolution technique ? D’abord une amélioration indéniable de la taille et de la qualité des images disponibles sur l’écran de l’ordinateur. Ensuite, la possibilité offerte par l’augmentation de la capacité de mémoire donne accès à des réalisations de type cinéma (films de fiction ou documentaires). Mais cela est suffisant pour ouvrir la voie à de nouveaux usages ? Les produits qui seront proposés sur ce nouveau support offriront-ils des procédés d’écriture ne se contentant pas de reprendre, en les améliorant, ceux qui existent déjà ? L’avenir du multimédia, que ce soit dans le domaine dominant du divertissement (jeu et fiction) ou dans celui de l’accès à la connaissance (dans une visée éducative ou culturelle) dépend sans doute en grande partie des réponses qui seront apportées à ces questions.

Le point commun des deux faces du DVD est une émission de télévision, le documentaire 1+1, édité par la société Hyptique et co-produit par l’INA, Movimento Production et Arte France. Cette chaîne l’a d’ailleurs diffusé en 2001. Le DVD-Vidéo permet donc de le visionner à nouveau, soit en en continu, soit en utilisant les fonctions de choix particulièrement efficaces qu’offrent les télécommandes des lecteurs (retour et avance rapide à la séquence voulue, sélection d’un chapitre particulier, etc.). Le DVD-Rom le présente aussi dans sa totalité, mais avec une série de compléments et d’ajouts qui en précisent et développent les thèmes. Le tout toujours en vidéo, 4 heures 30 au total, ce qui est tout à fait considérable.
On ne peut donc en premier lieu que souligner la richesse des contenus. Si la télévision a souvent été accusée de traiter la connaissance d’une façon superficielle ou en donnant trop de place au spectacle, ici ces reproches ne sont plus d’actualité. Tout est fait pour que l’utilisateur (qui est bien autre chose qu’un simple spectateur) comprenne, réfléchisse, approfondisse. Et si les contraintes de production, de réalisation et de diffusion d’une émission de télévision impliquent trop souvent de restreindre, voire de simplifier, le propos, ici tout le matériau filmique non retenu sera disponible et surtout accessible à partir d’une logique de prolongement et d’enrichissement du documentaire lui-même. Ces contenus additionnels sont présentés selon deux formes, des compléments proprement dits et des séquences thématiques. Les premiers sont désignés dans la présentation du titre comme les " notes de bas de page d’un livre ". Ils sont accessibles à tout moment du déroulement du film, en étroite corrélation avec son contenu. Voici à titre d’exemple, quelques-uns uns des points qui y sont développés : un virus est-il un être vivant, les maladies génétiques, la raison du maintien du sexe. Au total 10 compléments différents. Les séquences thématiques sont au nombre de sept ; les titres plus précis, proposent des élargissements par rapport à la problématique du film lui-même. On y retrouvera des données concernant successivement les premiers organismes vivants, le rôle des gênes et de l’environnement, les aspects historiques de la classification des êtres vivants, les difficultés de la notion d’individus, les contraintes et les hasards de l’histoire, un essai de définition de la biologie, la spécificité du langage humain et l’analogie avec le langage de l’ADN. Bref, la diversité des sujets abordés est impressionnante, même si la façon dont ils sont présentés reste des plus classiques, interviews de spécialistes et cours filmés au premier rang. Mais comme les intervenants savent parfaitement passionner leurs interlocuteurs, on oublie vite le statut d’élèves auquel on a parfois l’impression d’être réduits.
Richesse et diversité des contenus, soit. Mais qu’en est-il de l’écriture multimédia ? Quel est le niveau de performance des outils proposés ? Et la navigation, qualifiée bien évidemment d’intuitive par l’éditeur, est-elle cohérente avec le projet global d’accès à la connaissance sur un thème qui a priori peut être perçu comme passionnant, mais qui se révèle très vite complexe, quel que soit son niveau de connaissances scientifiques ?
Sur le DVD-Rom, le film peut être visionné selon deux modes. Plein écran et mode détaillé. Le mode plein écran donne la priorité à l’image, mais les fonctionnalités qui vont donner la main à l’utilisateur sont facilement accessibles puisqu’elles apparaissent sur le passage de la souris, en haut ou à droite de l’écran. Ce sont ces fonctionnalités qui donnent leur pleine efficacité au titre, dans la mesure essentiellement où elles sont en parfaite correspondance avec le déroulement du contenu. Elles en facilitent ainsi l’accès, tout en jouant un rôle indispensable d’éclairage et d’approfondissement. Il est donc utile de les détailler.
L’outil de recherche permet bien sûr de trouver toutes les occurrences d’un mot (recherche plein texte), mais il permet également, de façon plus fine, de les chercher dans le discours d’un intervenant particulier. Bien utile pour constituer un ensemble de citations pouvant aboutir à un document présentant les positions d’un des biologistes intervenant dans le film, avec ses nuances, ses doutes, ses repentirs éventuels. Cette manière de donner accès à la pensée des chercheurs est aussi l’objet de l’outil " personnages ", accessible sur le côté droit de l’écran. Si on l’utilise lors d’une intervention particulière, nous avons accès à une fiche nous présentant ses positions sur le sujet traité et une fiche biographique permet de suivre sa carrière. Enfin, un glossaire présente la liste des termes scientifiques utilisés tout au long du programme. Là aussi, les premières données fournies sont contextualisées par rapport au passage du film en cours. La définition proposée est elle aussi hypertextuelle et permet donc au non-spécialiste d’avoir toutes les précisions dont il peut avoir besoin.
Le deuxième mode d’accès au film est appelé " mode détaillé " et présente un ensemble de fonctionnalités supplémentaires grâce à un dispositif inédit dénommé " hyperfocus ". Nous disposons ainsi de la transcription intégrale de chaque document, texte pouvant être lu soit indépendamment de la vidéo soit de façon synchronisée avec elle. Et puis la navigation dans le film ne connaît quasiment pas de limite : on peut aller où on veut, quand on veut, et le point exact où l’on se rend est toujours précisément indiqué, ce qui est indispensable pour ne pas risquer de se perdre. D’ailleurs tout est fait pour que cette éventualité ne se produise pas. Un bouton " où suis-je " produit un sur-lignage de la phrase et du plan en courts. Un bandeau d’imagettes présente le découpage plan par plan de la séquence visionnée.
L’ensemble de ces possibilités de navigation et de consultation est complétée par des outils tout aussi perfectionnés d’appropriation personnelle des contenus. Il est ainsi possible d’éditer des extraits personnels, de définir les plans précis de début et de fin de chacun, de les renommer, de les copier et de les exporter par exemple dans son propre traitement de texte. Un simple cliquer-glisser permet aussi de faire un quasi-montage puisqu’il est possible de choisir l’ordre dans lequel ces extraits seront ensuite visionnés. Bref on en vient à se dire que toutes ces fonctionnalités doivent pouvoir rendre bien des services aussi bien au spécialiste, qu’à l’enseignant et aux étudiants et que décidément le multimédia a bien des ressources à nous offrir, même si rares seront sans doute ceux qui les utiliseront toutes dans la plénitude de leurs possibilités.
Ce DVD a déjà fait une belle moisson de prix : le prix sciences du Möbius France et le prix spécial du jury au Möbius International à Pékin en 2001. Il est en outre Reconnu d’Intérêt Pédagogique par le Ministère de l’Éducation. Ce qui est une juste reconnaissance de ses très grandes qualités.

Jean Pierre Carrier

Mise en ligne le 2 mai 2006
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