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Joris Ivens Cinéaste du monde
Jean Pierre Carrier

L’œuvre de Joris Ivens, si rarement diffusée en salle, est enfin accessible au plus grand nombre grâce à la remarquable édition de deux coffrets regroupant 5 DVD au total. L’occasion rêvée de (re)découvrir ce cinéaste d’origine hollandaise, habituellement classé comme documentariste, ou mieux encore, comme cinéaste engagé, contre la guerre au Vietnam d’abord et auprès de la révolution culturelle chinoise ensuite. Une vision stéréotypée qu’il est temps de revisiter de près.

Et d’abord parce que J Ivens n’a pas réalisé que des films politiques. Ce que nous offre le premier DVD, ce sont des films qualifiés de poétiques, qui se caractérisent avant tout par le travail sur la qualité des images, que ce soit dans le choix des cadrages ou dans la beauté esthétique du noir et blanc.

Quelques exemples de ces premières œuvres.

Etude de mouvements à Paris. 1927.

Des bus et des voitures qui foncent sur nous. Devant l’Opéra ou sur les boulevards. Vus de dessus, ou de côté, avec déjà la fumée des pots d’échappement. Les agents à cheval qui essaient de régler tout ça. Et sur les trottoirs ou sur le bord des rues, les passants, pressés, ou qui essaient de traverser sans trop prendre de risques. C’est qu’il y a beaucoup de circulation, et même des embouteillages ! Tout au long du film, la variété des cadrages est saisissante. Depuis les plans fixes au bord du trottoir jusqu’aux panoramiques suivant les véhicules devant les arcades de la rue de Rivoli, en passant par les caméras embarquées dans les taxis, qui préfigurent en quelque sorte les caméras subjectives. En 4 minutes, on comprend ce qu’une ville comme Paris a d’éternel : le mouvement, on dirait même mieux, l’agitation ou la trépidation de la vie. Comme s’il n’y avait jamais eu de Paris sans automobiles !

La pluie. 1929

Au commencement les nuages dans le ciel, et le vent qui pourrait les disperser mais qui au contraire les accumule. Les gouttes d’eau se multiplient sur l’asphalte et les canaux. Les parapluies font leur apparition, jusqu’à occuper tout le cadre comme dans ce magnifique plan d’une rue, en plongée, où les passants abrités sous leur toile ne semblent être là que pour l’harmonie du tableau. Tout au long du film on pense au poème d’André Breton : « la pluie seule est divine ». Un film qui peut vous réconcilier avec le mauvais temps. Le DVD propose en compléments deux version du même film avec accompagnement musical. Une bonne occasion d’appréhender l’apport que peut avoir la musique sur les images et de réfléchir à leur adéquation.

Le pont 1929. Symphonie industrielle 1931.

Il y a dans tous ces premiers films une fascination pour la vie moderne. Les moyens de transport sont omniprésents, des automobiles aux trains à vapeur, sans oublier les bateaux. De même les construction où l’acier domine, ou les engrenages et autres mécanismes sophistiqués, détaillés avec minutie comme ceux qui permettent au pont de s’élever dans les airs. Cet éloge de la mécanisation et au-delà de la vie industrielle culmine dans le film consacré aux usines Philips. Toutes ses activités sont approchées et décrites avec toujours autant de précision, de la fabrication d’une simple ampoule au montage des appareils radio ou autres électrophones. Mais dans cet univers mécanique, la présence humaine n’est pas oubliée. Filmer l’entreprise c’est aussi s’arrêter sur le travail des ouvriers. Le Joris Ivens cinéaste engagé et militant n’est pas loin.

La Seine rencontre Paris.1934

Un cinéaste sans inspiration aurait fait un documentaire banal : en suivant le parcours du fleuve, en s’arrêtant sur ses usagers, des pécheurs aux péniches, en filmant en travelling et en contre-plongée les immeubles des quais et les monuments, avec les inévitables plans sur la Tour Effel et Notre Dame. Il y a bien tout ça dans le film d’Ivens. Sauf que la banalité et le convenu est ici magnifié par la poésie des images et un montage qui semble toujours aller de soi mais qui justement tire sa force de cette simplicité apparente. La Seine d’Ivens, c’est la confrontation du dur labeur des ouvriers et des déambulations des amoureux.
En 1934, le cinéma n’est plus muet. Ici le commentaire est signé Jacques Prévert et il est dit par Serge Reggiani. La dimension poétique de cette première partie de l’œuvre du cinéaste trouve ici sa consécration.

Jean pierre Carrier

Mise en ligne le 3 juillet 2009
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