Retour à l'accueil |
Comprendre les médias >>
Les médias
Médias : la faillite d’un contrepouvoir, une interview de Philippe Merlant
Au fil du temps, le fossé s’est creusé entre les journalistes et les citoyens. Dans leur ouvrage Médias : la faillite d’un contrepouvoir1, Philippe Merlant et Luc Chatel, journalistes de presse écrite, pointent les raisons de cet état de fait. Pour autant, il n’est pas question pour eux de camper sur une simple critique, alors ils analysent les conditions de fabrication de l’information, décryptent les relations des médias et des différents pouvoirs, et proposent des pistes pour réconcilier les journalistes avec leur public. Philippe Merlant nous en donne un aperçu dans cette interview menée par Christine Menzaghi, de l’association Information et citoyenneté. Le titre de votre ouvrage, Médias : la faillite d’un contre-pouvoir, pose sans concession les termes du débat que vous avez souhaité lancer… Philippe Merlant : Notre éditeur nous avait d’abord proposé Médias : les limites du quatrième pouvoir. Pour Luc Chatel comme pour moi, cela ne reflétait pas assez ce constat : les médias représentaient jadis un contre-pouvoir aux yeux des citoyens, et ce n’est plus le cas aujourd’hui. C’est donc bien d’une faillite qu’il s’agit. Selon vous, quelles en sont les causes ? Elles sont multiples. Il y a déjà l’origine sociale des journalistes, extrêmement homogène. Une bonne partie d’entre eux ignore tout des couches populaires. Comment, alors, rendre compte de ce qui se passe dans ce milieu ? Et puis, comme Luc Chatel et moi l’affirmons dans notre livre au risque de déplaire, le journalisme est aussi, sinon d’abord, une vision du monde, structurée et unifiée autour de quelques hypothèses rarement formulées. Un exemple : la mise en avant par les médias du mythe de l’individu tout puissant, placé au centre de l’univers et capable de le modeler à sa guise. Ainsi, le portrait est devenu le fer de lance des journaux, tout comme les palmarès : « Les 50 qui font la France », « Les 100 meilleures écoles », « Les 10 recettes pour ceci ou cela… ». Tout cela contribue à une vision purement concurrentielle du monde, évacuant le lien et la solidarité, donc aboutissant à une « dépolitisation » de l’individu. Les médias raisonnent de plus en plus en termes de performance, nous avons renoncé à interroger le pourquoi, le comment et le sens. À cela, il convient d’ajouter la précarisation du métier et la dégradation des conditions de travail. Le nombre de journalistes permanents diminue régulièrement dans les rédactions. Force est de constater que la crise économique de la presse entraîne un manque de moyens pour l’investigation, indispensable au métier de journaliste. Les reportages et enquêtes tendent à disparaître, au profit de l’information anecdotique et du « journalisme assis », moins cher. Pour autant vous estimez que les choses peuvent évoluer ? Bien sûr. Mais le changement ne peut venir que de ceux qui sont victimes de ce système et ont donc intérêt à le faire bouger. D’abord les journalistes eux-mêmes, certes le malaise, voire la souffrance, est profond au sein des rédactions, mais les professionnels de l’information, fiers de la « noblesse » de leur métier, ont parfois du mal à se reconnaître comme victimes. Ensuite, les citoyens qui ne sont pas satisfaits de la qualité de l’information, notamment les classes populaires qui subissent une « double peine médiatique » en ce qu’ils se sentent ignorés des médias. Mais il faudrait que le public abandonne cette posture qui consiste juste à protester… en cessant d’acheter ! Aujourd’hui, c’est donc ensemble, journalistes et citoyens, que nous devons ouvrir des brèches. Plusieurs initiatives vont dans ce sens, notamment les Assises internationales du journalisme, qui ont débouché sur la rédaction d’une « charte de qualité de l’information ». L’association Information et citoyenneté a également été créée 2… Il faudrait mettre en place en France un conseil de presse : cette instance nationale Propos recueillis par Christine Menzaghi 1. Médias : La faillite d’un contre-pouvoir, éditions Fayard, septembre 2009, 300 pages, 19 euros. 2. Information et citoyenneté, association créée à l’initiative des Francas, des Ceméa et de la Ligue de l’enseignement. Mise en ligne le 1er mai 2010
|
RECHERCHE
>> Faire une recherche Qwant
EVENEMENT
11 décembre 2018
12 décembre 2018
24 janvier 2019
DERNIERS ARTICLES
15 décembre 2021
23 décembre 2020
11 décembre 2020
11 décembre 2020
27 novembre 2020
17 septembre 2020
30 juin 2020
24 avril 2020
20 avril 2020
23 mars 2020
22 novembre 2019
31 octobre 2019
9 septembre 2019
27 juin 2019
18 juin 2019
12 mai 2019
26 avril 2019
5 avril 2019
27 mars 2019
27 février 2019
25 février 2019
18 février 2019
|