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LA RIZIERE Un film de Xiaoling Zhu
Jean Pierre Carrier

LA RIZIERE
Un film de Xiaoling Zhu

Chronique d’un village Dong, une minorité du sud de la Chine. Chronique rythmé par les dates précises auxquelles les travaux dans les rizières doivent être effectués. Un village perdu dans la montagne, loin de toute ville, accessible seulement après une longue marche depuis l’arrêt du bus. Les paysages sont magnifiques et les images du film en rendent parfaitement compte. Pour un spectateur occidental, cette beauté peut renvoyer à l’esthétique de la carte postale. Pourtant le film ne va pas vraiment dans cette direction. Certes les rizières perdues dans les montagnes sont visuellement grandioses. Mais dans le film, tout est fait pour que nous n’oubliions pas la dureté des conditions de vie de ces paysans et la pénabilité des conditions de travail pour labourer la rizière ou récolter le riz. Si les images sont toujours empreintes de calme et de sérénité, c’est aussi parce que cela correspond à la culture et à la mentalité du peuple Dong. Et pourtant. L’incendie du village, sa destruction totale qui clôt le film nous le rappelle avec force, l’avenir pour les plus pauvres n’est jamais assuré. Le mode de vie ancestral des paysans n’est-il pas condamné ? Les jeunes ne seront-ils pas de plus en plus obligés de quitter le village, d’aller chercher du travail à la ville, même si cela est particulièrement difficile et jamais garanti. Les rizières pourront-elles continuer à nourrir les familles ? Le film ne donne pas une réponse catégorique à cette question. Mais il montre clairement que les évolutions en cours vont toutes dans le même sens. Seul un miracle pourrait infléchir le cours des choses. Mais le film s’achève abruptement sur une catastrophe.

Pour développer cette chronique rurale, le film se focalise sur une famille, et plus particulièrement sur une jeune fille de 12 ans, A Qiu, dont la voix intérieure nous donne les éléments indispensables à la compréhension de la vie du village et de sa famille. Au début du film, A Qiu et son petit frère vivent avec leurs grands-parents, le père et la mère étant partis travailler en ville. Mais la mort subite de la grand-mère va les obliger à regagner le village et à effectuer le travail que demande la rizière. Les enjeux économiques sont clairs. La récolte de riz est toujours incertaine. Et puis, A Qiu est en âge d’aller au collège pour poursuivre des études qu’elle aime. Ce que lui permet d’ailleurs de faire les notes obtenues au concours d’entrée, même si celles-ci ne lui permettent pas d’obtenir une bourse. Où trouver l’argent que cela nécessite ? Contrairement à son petit frère qui lui rêve d’apprendre le métier de charpentier de son grand-père, pour poursuivre l’œuvre de bâtisseur de ce dernier (il dirige dans le film la construction d’une pagode en bois), A Qiu veut faire des études les plus longues possibles, jusqu’à l’université, même s’il lui en coûte de devoir pour cela quitter son village et sa famille. Mais, a-t-elle vraiment le choix ? La vie de paysan n’est plus pour elle une perspective d’avenir.

Le film décrit avec une précision de documentaire la vie quotidienne de chaque membre de la famille, leurs aspirations et leurs rêves d’avenir. Le père voudrait bien repartir à la ville, mais il n’est pas assuré d’y retrouver du travail. Du moins voudrait-il ne pas rester un simple paysan/ Mais où trouver l’argent pour acheter un camion, même vieux et menacé de panne ? Son premier investissement consiste dans l’achat d’un buffle. Pour que sa revente soit rentable, la solution est d’en faire un buffle de combat. Hélas, après quelques essais, il est évident qu’il ne deviendra pas le roi de buffle. La mère de son côté veut bien rester au village, mais elle trouve dans le chant et le spectacle le moyen, non seulement de financer les études de sa fille mais aussi de sublimer en quelque sorte sa condition de paysanne. Ainsi va la vie quotidienne de cette famille attachante, vie simple sans doute, en relation avec les traditions ancestrales, mais une vie qui revêt une dimension universelle en fonction des difficultés que représente pour chacun la modernité.

Le film de Xiaoling Zhu est une fiction dans la mesure où il repose sur un scénario précis et déterminé. Mais les personnages ne sont pas joués par des acteurs professionnels. Ils ont été recrutés dans le village pour jouer leur propre rôle. Ainsi, la dimension documentaire du film est évidente. C’est bien la situation réelle d’un village et d’une de ses familles qu’il nous donne à connaître et à comprendre. Son rythme lent est en parfaite adéquation avec la réalité qu’il nous montre. Il mérite de connaître une large diffusion pour éviter de limiter notre vision de la Chine actuelle au gigantisme des buildings de Shanghai et des usines d’où proviennent tous les articles made in china.

Jean Pierre Carrier

Ce film a été présenté au Festival du Film d’Education d’Evreux le samedi 19 novembre 2011

Mise en ligne le 27 novembre 2011
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